Soufflenheim, située au nord de l’Alsace, est réputée pour son artisanat potier. Le village abrite une dizaine d’ateliers de poterie toujours actifs, où l’on produit des articles variés allant de la vaisselle, comme les célèbres moules à kougelhopf et terrines à choucroute et baeckeoffe, à des objets de décoration. L’histoire de cette activité céramique remonte à l’âge du Bronze.
Les « tumuli », tertres funéraires découverts dans la forêt de Haguenau, ont révélé plusieurs objets tels que des bijoux, des armes et des poteries. Ces trouvailles montrent que les habitants de l’âge du Bronze utilisaient déjà l’argile locale pour fabriquer de la vaisselle. Cependant, les tessons romains trouvés ne permettent pas de tirer des conclusions précises sur leur origine.
Le privilège des potiers au Moyen Âge
Au XIIe siècle, les potiers de Soufflenheim obtinrent de l’empereur Frédéric Ier Barberousse le droit d’extraire gratuitement et perpétuellement l’argile de la forêt de Haguenau. Cette tradition repose sur une légende avec deux versions : l’une raconte que l’empereur, attaqué par un sanglier en forêt, fut sauvé par un potier. L’autre version évoque un privilège accordé en remerciement d’une crèche en terre cuite offerte par les potiers à l’empereur.
Un village de potiers
En 1837, Soufflenheim comptait 55 poteries, dont deux tiers étaient des potiers-paysans. Une coopérative fournissait les matières premières nécessaires, permettant aux paysans de pratiquer la poterie en hiver, lorsqu’il n’y avait pas de travaux agricoles. À cette époque, environ 600 des 3000 habitants vivaient de la céramique, incluant tuileries et briqueteries.
La transformation et la renaissance de la poterie
Après 1870, plusieurs ateliers fermèrent, ne survivant que ceux produisant des pièces à caractère artistique. Cette situation perdura jusqu’après la Deuxième Guerre mondiale. Ce n’est que dans les années 1960 que la poterie de Soufflenheim connut une renaissance grâce à l’engouement du marché allemand pour cet artisanat local.
Un héritage préservé
Au centre du village, un monument du passé potier subsiste : en 1930, les céramistes Léon Elchinger, son fils Fernand et Charles Burger ont réalisé une œuvre monumentale inspirée de la fresque de Léonard de Vinci, la Sainte Cène, en céramique avec 13 personnages grandeur nature. Cette pièce unique, protégée derrière une vitre, se trouve sur l’Oelberg, le Mont des Oliviers, ancien cimetière fortifié du village.
Défis contemporains
La dizaine d’ateliers de potiers actifs contribuent à l’image positive du village, chacun ayant une histoire unique. Cependant, la transmission du savoir-faire est plus difficile pour la génération actuelle en raison de la concurrence, notamment de la Chine, où les coûts de production sont bien plus bas.
L’activité céramique est aujourd’hui plus artisanale qu’artistique, avec une production destinée à un usage pratique, comme les moules à kougelhopf, les assiettes et les tasses. Les confinements ont également impacté les ventes et ralenti la production, forçant l’atelier à fonctionner à un rythme réduit.
Soufflenheim aujourd’hui
Aujourd’hui, Soufflenheim reste un pilier dans le domaine de la poterie, un village où l’activité céramique continue d’être exercée avec passion, perpétuant ainsi un héritage ancestral tout en affrontant les défis modernes.